Carmen Duplantie - 1949 |
Ma mère est arrivée sur la rue Saint-Augustin en 1951, au bras de son mari, Lucien Jutras. Elle était née en 1926 à Hawkesbury en Ontario mais elle connaissait déjà l'Autre bord du lac pour y avoir visité, lorsqu'elle était plus jeune, sa tante Gracia, mariée à Oscar Dicaire, les voisins de son futur époux. (Voir l'article Les Dicaire)
Hawkesbury avait une population comparable à celle de La Tuque et comme elle, une rue commerciale ainsi qu'une usine de la C.I.P. Mon grand-père, Hermas Duplantie, y travaillait comme mon grand-père paternel l'avait fait lui aussi, mais à La Tuque au temps de la Brown.
La rue principale de Hawkesbury - 1939 Source: Bibliothèque publique du canton de Russel |
L'usine de la Canadian international paper à Hawkesbury - 1940 Source: Bibliothèque publique du canton de Russel |
Hawkesbury et La Tuque se sont aussi partagé le même chef des pompiers puisque mon arrière-grand-père maternel, Jos Parent, a occupé cette fonction à La Tuque au milieu des années '20 avant de retourner chez lui à Hawkesbury.
Le chef Jos Parent, entouré de ses hommes en 1922 à La Tuque Source: The Brown bulletin, Berlin NH, novembre 1922 |
Nora Parent et Hermas Duplantie avaient eu onze enfants: Odette, Carmen, Raymond, Lucille, Hélène, Rita, Suzanne, Monique et Andrée. Deux étaient décédés en très bas âge, Conrad et Michel. Mes grands-parents habitaient une toute petite maison sur Main street à Hawkesbury dont la cour arrière donnait sur la rivières des Outaouais.
Hermas Duplantie et Nora Parent vers 1924 |
Ma mère fit ses études à l'école normale d'Ottawa où elle obtint un brevet d'enseignement...
Vers 1945 à l'école normale d'Ottawa |
et elle enseigna par la suite à l'Académie Saint-Joseph de Hawkesbury...
L'Académie Saint-Joseph Source: Bibliothèque publique du canton de Russel |
à des groupes de garçons de deuxième année.
Groupe d'élèves - 1951 Source: Bibliothèque publique du canton de Russel |
Lorsque ma mère arriva à La Tuque en septembre 1951, elle s'installa avec son mari dans la maison de la rue Saint-Augustin où mon grand-père habitait encore.
Dès le mois d'octobre, mes grands-parents Duplantie vinrent lui rendre visite et voir comment elle était installée.
Mon grand-père Duplantie avec son frère Léo sur le perron de la maison de la rue Saint-Augustin - 1951 |
Sur le point du retour pour Hawkesbury - 1951 |
Ma mère et ses parents avant leur départ - octobre 1951 |
Ma mère a consacré sa vie à sa famille, ses enfants et son mari. Ses voisines étaient Dorothy O'Farrell (mariée à Rodolphe Mercier), Rita Tremblay (mariée à Clément Fortin), Berthe-Alice Gravel (mariée à Léger Martel) et un peu plus tard, Suzanne Carpentier (mariée à François Frigon).
Je suis né en 1952 et j'étais le premier de ses enfants. Ma soeur Céline a suivi, puis mon frère Jacques et mes soeurs Danièle et Lucie par la suite.
Dans la cuisine de la maison de la rue Saint-Augustin - 1952 |
Les pique-niques que ma mère organisait étaient parmi nos activités préférées, surtout ceux du p'tit lac où tout le monde pouvait se rendre à pied.
Une scène à l'italienne ou presque ... ma mère assise enceinte de ma soeur Céline et mon grand-père appuyé sur le dossier de sa chaise. |
Nous allions à Hawkesbury deux fois par année; habituellement à Pâques et une deuxième fois, pendant l'été dans le "temps des foins". Ma mère était particulièrement heureuse de ces voyages qui lui permettaient de retrouver les siens.
Sur la galerie avant de la maison de Hawkesbury avec mon frère Jacques, moi et ma soeur Céline - 1956 |
Dans la cour chez sa soeur Odette à l'Orignal |
Nous allions aussi de temps en temps à Saint-Roch-des-Aulnaies où mon père avait de la famille dont son cousin Louis-Albert Duval qui habitait, avec sa famille et sa mère, une immense et belle maison ancestrale et possédait trois petits chalets d'été sur le bord de la grève à l'Anse aux marins.
Mes parents sur les rochers près de la grève. |
Devant un des petits chalets de l'Anse aux marins |
À l'époque où mon père était le gérant du magasin Coop, mes parents avaient une vie sociale assez active: Chambre de commerce, Comité des loisirs Coop, Harmonie de La Tuque. Ma mère avait de bonnes amies parmi les personnes qu'elle côtoyait lors de ces sorties.
Au centre, ma mère et à sa gauche, son amie Jeanne Lortie |
Après mon départ pour le Séminaire de Nicolet en 1967, ma mère est retournée pendant une courte période à l'enseignement en faisant surtout de la suppléance à l'école Marie-Médiatrice. De l'avis de plusieurs, elle était très bonne enseignante et beaucoup aimée de ses élèves.
À l'automne 2013, elle a reçu une lettre d'un ancien élève de l'Académie Saint-Joseph de Hawkesbury à qui elle avait enseigné à la fin des années '40. Il avait réussi à la retrouver, soixante-cinq ans plus tard, et à lui écrire pour lui dire comment elle avait marqué son enfance et son éducation comme enseignante.
À l'automne 2013, elle a reçu une lettre d'un ancien élève de l'Académie Saint-Joseph de Hawkesbury à qui elle avait enseigné à la fin des années '40. Il avait réussi à la retrouver, soixante-cinq ans plus tard, et à lui écrire pour lui dire comment elle avait marqué son enfance et son éducation comme enseignante.
Photo Jacques Jutras - 2008 |
Dans mon recueil L'Autre bord du lac publié aux Éditions d'art Le Sabord en 2011, j'ai écrit ce texte pour elle.
L’absence
Depuis quelques jours
ils étaient quatre
le plus vieux n’avait que six ans
il y avait bien le père et le grand-père
mais la mère n’y était plus
après avoir mis au monde
le quatrième de ses enfants
elle était partie, disait-on
se refaire une santé
avec courage
le père avait placé les trois derniers
alors que le plus vieux
troisième génération
allait rester avec lui
parfois, tous les deux
lui, jouqué sur un oreiller
côté passager
ils partaient pour Montréal
dans le Ford Custom ’52
elle était là, à la fenêtre
d’un hôpital sans doute
depuis le stationnement
il lui envoyait la main
puis elle disparaissait
alors le père lui rapportait
des bricolages
qu’elle avait faits
et des lettres
qu’elle lui avait écrites
le jour de sa rentrée à l’école
alors que les autres garçons
pleuraient leur séparation
lui
pourquoi l’aurait-il fait
l’absence s’installa à demeure
à l’école on lui apprenait
images à l’appui
que l’éternité, c’est long
toujours, jamais, toujours, jamais
puis un jour, comme ça
au début d’un été
alors qu’il faisait beau
l’éternité a pris fin
en rentrant de l’école
il la vit
sur la galerie
elle était là
dans sa robe bleu pâle en tissu crêpé
avec un collier en fausses perles de plastique orange
mais qu’est-ce qu’elle était belle
© Michel Jutras