Au coeur de l'Autre bord du lac - 1943

Au coeur de l'Autre bord du lac - 1943
Source: BAnQ - détail d'une carte postale 1943 - numérisation Gaston Gravel

vendredi 15 août 2014

Rue Saint-Augustin

La rue Saint-Augustin a les pieds dans le p'tit lac et la tête dans la côte Saint-Michel.  Elle n'est pas très longue et comme un chat, elle fait le gros dos.  À son sommet, un court plateau pour le hockey dans la rue l'hiver et les rassemblements en bicycle les soirs d'été.

La rue Saint-Augustin est au coeur d'un des plus vieux quartiers de La Tuque, l'Autre bord du lac.  L'article qui suit est consacré à cette rue et à ses occupants de la première heure. C'est la rue où mon grand-père a bâti sa maison et où mon père et moi avons grandi.



La rue Saint-Augustin apparaît sur les plans de la ville à partir de 1914, mais elle porte la désignation temporaire de "Ave. D".  Aucune maison n'y apparaît encore, bien que les numéros de lots (préfixes seulement) y figurent.  À titre d'exemple, mon grand-père Albert Jutras a acheté en 1915 le lot 23-A-26, correspondant au numéro civique 42 à cette époque (aujourd'hui le 372).

On remarque également sur le plan de 1914 que les rues de l'Autre bord du lac devaient se prolonger au-delà de la rue Saint-Michel (désignée sur le plan comme la "Sixth") et même au-delà de l'avenue Brown.


Chas E. Goad Co. Toronto - 1914
Détail d'un plan  -  Source:  BAnQ

En 1955, sur un plan pour fins d'assurance de la ville, on y voit les dix maisons de la rue Saint-Augustin construites probablement entre 1914 et 1920 et peut-être même avant malgré qu'elles n'apparaissent pas sur le plan de 1914.


Insurance plan of the town of La Tuque
Underwriter's survey bureau limited - 1955
Détail d'un plan - Source:  BAnQ

Je vous les présente ainsi que leurs occupants en 1921, l'année du recensement.


En partant de la rue de la Plage, en direction Nord, côté Est.

Le 52 rue Saint-Augustin (aujourd'hui le 376)

Oscar Dicaire, né en 1895 et originaire de Hawkesbury, arrive à La Tuque en 1915.  Il se mariera quelques années plus tard avec Gracia Parent, la fille du chef de police Jos Parent.  En 1921, Oscar a 27 ans et il travaille comme Foreman à la Brown.  Ses revenus annuels sont de 1 100$.  Sa femme est âgée de 24 ans et elle a déjà trois enfants:  Eugène 3 ans, Laurent 2 ans et Fernando 5 mois.  Lors de sa construction, la maison appartient au docteur Vilandry, le médecin de la Brown, et elle n'a qu'un seul étage et un toit à quatre faces.  Elle sera agrandie de façon importante par Oscar Dicaire avec l'ajout d'un premier étage avec solarium et d'une grande galerie couverte.

Plus tard, le premier étage sera converti en logement qui sera occupé par la famille de François Frigon et ensuite par Siméon Grenier, son épouse Kate et son fils surnommé Ti-Vieux.

Lise, la fille de Bernard Dicaire et donc la petite-fille d'Oscar et Gracia, occupera le rez-de-chaussée de la maison dans les années  '80 et '90.


La maison d'Oscar Dicaire
Détail d'une carte-postale - circa 1940   source:  BAnQ

Photo:  Michel Jutras 2014



Le 48 rue Saint-Augustin (aujourd'hui le 372)

En 1915, Albert Jutras achète pour 200$ le lot 23-A-26 de la rue Saint-Augustin pour y bâtir sa maison.  En 1921, il a 38 ans et travaille à la Brown comme Pumpman.  Ses revenus annuels sont de  1 400$.  Il s'est marié en novembre de l'année précédente avec Lumina Duval de Saint-Roch-des-Aulnaies.  Lumina est âgée de 32 ans et c'est sa troisième épouse avec qui il aura cinq enfants par la suite:  Bertha, Fernande, Lionel, Lucien et Thérèse.  Lors du recensement, le couple vit avec Fernando, 15 ans, le fils d'Albert et de sa première épouse Marie Houle, Marie-Ange, 3 ans, la fille d'Albert et de sa deuxième femme Exavérina Fréchette, et enfin Denis Dubé 2 ans, le fils de Lumina et de son premier mari, Auguste Dubé.

La maison est petite et rapidement, mon grand-père y ajoutera une annexe qui servira de cuisine et où une salle de bain sera aménagée ainsi qu'une trappe au plancher pour descendre à la cave.  En 1952, il construira un appentis derrière cette annexe qui servira de remise et que nous désignerons affectueusement la cabane.



La maison d'Albert Jutras - circa 1950
Archives familiales

Photo:  Michel Jutras - 2014


44 rue Saint-Augustin (aujourd'hui le 368)

Octave Gagnon est bûcheron, il a 33 ans et ses revenus sont de 1 400$.  Nous sommes en 1921.  Avec sa femme Alma, âgée de 23 ans, il ont eu deux enfants, Lucianne 4 ans et Floriant 3 ans.  

Cette maison possédait un immense hangar dans la cour arrière et une allée en mâche-fer y donnant accès.  Elle était recouverte, comme toutes les maisons de la rue Saint-Augustin, de bardeaux de cèdre sur lesquels était appliquée une peinture rouge-vin très populaire à l'époque.

Par la suite, cette maison sera occupée par la famille de Aimé Jean puis par Bernard Rochette marié à Marguerite O'Farrell qui demeurait juste en face.  Finalement, la maison sera vendue en 1952 à Rodolphe Mercier qui s'est marié avec Dorothy O'Farrell quelques années auparavant.  Ensemble, ils ont eu une fille, Évelyne, qui fut une de mes premières amies d'enfance et qui habite encore la maison familivoisine de la nôtre.

La maison d'Octave Gagnon
Détail d'une photo de Roland Boudrault
Début des années '60

Photo:  Michel Jutras - 2014


40 rue Saint-Augustin (aujourd'hui le 364)

Cette petite maison d'un étage et demi est occupée en 1921 par William Gravel qui a 37 ans et travaille comme Stockkeeper.  Ses revenus pour l'année sont de 1 600$.  La famille de William Gravel et de son épouse Joséphine compte 10 enfants:  Rose 16 ans, Yvonne 15 ans, Marie 13 ans, Arthur 12 ans, Marie-Louise 11 ans, Hector 7 ans, Horace 6 ans, Marc 3 ans, Émile 2 ans et Simone 3 mois.

La maison comprend également un logis de trois pièces au premier étage dont le numéro civique est le 42.  Ce logement est occupé par Louis Laflamme, son épouse Palmina et leurs deux enfants, Fernand et Yvette.  Louis Laflamme est journalier et ses revenus ont été de 1 400$.

Cette maison sera habitée plus tard par les familles Beaudin au rez-de-chaussée et Gravel au premier étage.  Aujourd'hui, ce sont deux des enfants de Clément et Rita Fortin qui en occupent respectivement le rez-de-chaussée et le premier étage.


La maison de William Gravel
Détail d'une carte-postale - circa 1940    source: BAnQ

Photo:  Michel Jutras - 2014


36 rue Saint-Augustin (aujourd'hui le 360)

En 1921, Alphonse Séguin, 41 ans, est marié à Florilda qui a 10 ans de moins que lui.  Ils ont cinq enfants:  Joseph 11 ans, Léonidas 6 ans, Adrien 3 ans, Roland 2 ans, Paul-Émile 6 mois.  La maison d'un étage et demi possède une grand galerie à l'avant.  Dans la cour arrière, est construit un grand hangar à deux étage où nous avons si souvent joué aux cowboys.

Cette maison sera occupée dans les années '50 à '70 par la famille Desroches.  Voir l'article La shed chez Desroches.


La maison d'Alphonse Séguin
Détail d'une photo de Roland Boudrault
Début des années '60

Photo:  Michel Jutras - 2014


32 rue Saint-Augustin (aujourd'hui le 356)

Au moment du recensement de 1921, Joseph Charland était Foreman à la Brown et il avait 46 ans.  Cette année-là, ses revenus sont de 1 800$.  Alice, son épouse, avait 46 ans elle-aussi.  Neuf enfants habitent avec eux:  Johnny 25 ans, Welly 19 ans, Austin 18 ans, Cécile 17 ans, Blanche 15 ans, Georges 14 ans, Gabrielle 12 ans, Germaine 11 ans, Armand 9 ans.

Johnny qui travaille comme électricien déclare des revenus de 1 900$ soit 100$ de plus que son père alors que Welly, qui a dix-neuf ans, a gagné 700$ dans l'année. 

C'est le plus jeune de la famille, Armand, marié à Gemma Beaulieu, qui conservera la maison pour y élever sa famille.  Cette maison avait ceci de particulier:  elle n'avait pas d'entrée charretière sur la rue Saint-Augustin.  Il fallait emprunter une entrée mitoyenne donnant sur la rue Saint-Michel pour avoir accès à la cour et au garage.


La maison de Joseph Charland
Détail d'une photo de Roland Boudrault
Début des années '60

Photo:  Michel Jutras - 2014


En partant de la rue de la Plage, en direction Nord, côté Ouest.

51 rue Saint-Augustin (aujourd'hui le 369)

Joseph Bouchard a 48 ans.  Il est journalier et locataire de la maison du 51 rue Saint-Augustin.  Son épouse Marie-Louise a 43 ans.  Les revenus de Joseph sont de 1 300$ pour l'année.  Ils ont dix enfants à la maison.  Antonio 24 ans et Abraham 23 ans sont bûcherons.  Ils ont gagné respectivement 1 200$ et 900$ dans l'année.  Ludger  qui a 21 ans est menuisier et ses revenus ont été de 1 200$.  Puis, suivent Lucia 19 ans, Annette 17 ans, Bernadette 15 ans, Lucienne 13 ans, Aurore 11 ans, Jorenne 6 ans et Yvette 4 ans.  Les revenus de la famille Bouchard sont donc les plus élevés de la rue Saint-Augustin.

Lors de sa construction, la maison du 51 rue Saint-Augustin n'a qu'un seul étage et compte cinq pièces.  Elle sera agrandi d'un étage complet lorsque Eugène Martel en deviendra propriétaire.  Il y habitera avec sa soeur Fernande de très nombreuses années.  Ils étaient voisins de leur frère Léger Martel dont la maison donnait sur la rue de la Plage, juste à côté.  Au moment du recensement en 1921, Léger,  Eugène et Fernande Martel demeurent avec leur père sur la rue Saint-Louis, au coin de la rue Saint-Georges.


La maison de Joseph Bouchard
Détail d'une carte-postale - circa 1940   source:  BAnQ

Photo:  Michel Jutras - 2014


367 rue Saint-Augustin

En 1921, les Fortin ne sont pas encore installés sur la rue Saint-Augustin mais quelques années plus tard, ils habiteront le rez-de-chaussée du 361, la maison qu'occupait le boulanger Langelier lors du recensement.  À la fin des années '50, Clément Fortin fera bâtir la sienne sur le terrain adjacent et sa maison portera le numéro civique 367.  Je considère que cette maison, même si elle n'a pas été construite entre 1914 et 1920, fait partie de l'histoire de l'Autre bord du lac.  Elle est la onzième maison de la rue Saint-Augustin.



La maison de Clément Fortin
Photo:  Michel Jutras - 2014


41 rue Saint-Augustin (aujourd'hui le 361)

Honorius Langelier a 33 ans.  Il est boulanger et gagne 1 800$ par année.  Sa femme Anna a 35 ans et leurs enfants ont moins de dix ans:  Anna-Rosarie 7 ans, Gérard 5 ans, Maurice 4 ans, Raymond 1 an.

Cette maison abritera un certain temps la famille de Clément Fortin et lorsque celui-ci construira la sienne juste à côté, c'est John O'Farrell qui s'y installera avec sa femme.

Le maison compte aussi un logis au premier étage qui est occupé en 1921 par François Cauchon, 34 ans, sans travail.  Il y vit avec sa femme, Blanche, qui a 32 ans.  Ils n'ont pas d'enfants avec eux.  Dans les années '60, le policier René Dion s'y installera avec sa nouvelle épouse et son fils Marcel.

Au sous-sol, il y avait également un logement qui fut, quelques années, occupé par d'autres Fortin, parents avec la famille de Clément.



La maison d'Honorius Langelier
Détail d'une photo non datée
Source:  Centre interuniversitaire d'études québécoises (CIEQ)

Photo:  Michel Jutras - 2014


35 rue Saint-Augustin (aujourd'hui le 359)

Frank O'Farrell, 34 ans, Foreman à la Brown, est marié à Mary, 34 ans. Cinq enfants sont avec eux:  Dorothy 9 ans, Iris 7 ans, Marguerite 4 ans, Edna 3 ans et Charlotte 7 mois.  Dans l'année, monsieur O'Farrell a gagné 1 800$.  Le recenseur note que l'origine raciale des occupants est Irish canadian.

C'est Léo Boutet, qui habite en 1921 avec ses parents sur la rue Saint-Honoré, qui fera l'acquisition de la maison des O'Farrell pour s'y installer avec sa femme Rita Patry et leurs enfants, Andrée, Alain, Joanne, Line et Manon.



La maison de Frank O'Farrell - 1952
Archives familiales

Photo:  Michel Jutras - 2014


27 rue Saint-Augustin (aujourd'hui le 353 agrandi avec le 357)

Antoine Tremblay a fait bâtir sa maison sur un grand terrain qui lui permettra de l'agrandir par l'ajout d'un logement qui portera plus tard le numéro civique 357.  En 1921, il a 36 ans et travaille comme journalier.  Ses revenus annuels sont de 1 700$.  Son épouse Hélène est âgée de 40 ans et ils ont un fils, Armand, qui a 15 ans et travaille déjà comme commissionnaire.  Il a même gagné 700$ dans l'année.  Ils ont aussi une fille, Lucille, âgée de 9 ans.

Je voyais souvent le vieux monsieur Tremblay partir de chez-lui à pied, portant son habit noir et son chapeau, et s'appuyant sur sa canne, monter en ville pour aller passer l'après-midi avec mon grand-père sur le banc des vieux devant l'ancien bureau de poste.

Dans le logement ajouté à sa maison, si je me souviens bien, vivait sa fille Lucille.



La maison d'Antoine Tremblay
Détail d'une photo non datée
Source:  Centre interuniversitaire d'études québécoises (CIEQ)

Photo:  Michel Jutras - 2014




Note:  

les renseignements nominatifs contenus dans cet article proviennent du recensement canadien de 1921.  Source:  Bibliothèque et Archives du Canada.  

Les faits et les descriptions font partie de mes souvenirs et de ceux de ma famille. Ils peuvent donc être sujets à interprétation.


2 commentaires:

  1. Je trouve que vous faites un travail fantastique et qu'il est grandement agréable de venir vous lire ....Merci du temps que vous y consacré....

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  2. Bravo Michel pour un autre intéressant épisode ajouté à ton blogue !

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