Au coeur de l'Autre bord du lac - 1943

Au coeur de l'Autre bord du lac - 1943
Source: BAnQ - détail d'une carte postale 1943 - numérisation Gaston Gravel

dimanche 7 avril 2019

L'église Saint-Zéphirin


Elle n'était pas franchement l'Autre bord du lac mais l'église Saint-Zéphirin, même si elle nous tournait le dos, était la nôtre.  

Photo:  Michel Jutras juin 2015

De toute façon, nous n'entrions jamais par en-avant.  Les grandes portes en cuivre conçues et fabriquées par l'artiste Albert Gilles étaient tellement lourdes et imposantes que nous ne les empruntions qu'avec ma mère à Noël pour la messe de minuit.




Toutes les autres fois, et elles étaient nombreuses, nous utilisions la petite porte sur le côté de la rue Saint-Antoine.  Curieusement, nous entrions par en-arrière et nous arrivions en-avant.  Longeant la série de confessionnaux et le bac à lampions en fer forgé, nous prenions place ma soeur et moi dans les bancs de côté, prêts à sortir côté cour.


Photo Google street 2019

À chaque fois, mon grand-père était là, dans cette section que privilégiait le monde de l'Autre bord du lac.  Nous nous assoyions rarement avec lui, mais souvent juste derrière.  Il partageait son banc avec la grosse madame Lajoie qui portait tout le temps de grands chapeaux, ce qui avait l'air de le contrarier dans son recueillement.


Source:  BAnQ, collection Magella Bureau

Et puis un jour, en 1961, l'église passa au feu, du moins son intérieur fut pas mal endommagé.  Le curé Louis Caron entreprit alors de  lui refaire une beauté et du coup, la fresque derrière l'autel s'en trouva moins terrifiante et plus lumineuse.


Photo: Répertoire du patrimoine culturel du Québec

Photo:  Répertoire du patrimoine culturel du Québec

Un jour, à la suggestion de matante Gracia, l'épouse d'Oscar Dicaire (nos voisins), mon père me demanda si je voulais être enfant de choeur.  Belle tentative...  mais je considérais qu'ils étaient déjà assez nombreux comme ça...


Avant 1961, source indéterminée

Alors si c'est non pour servir la messe, la chorale alors ?  Je n'ai pas eu le choix !  Va pour la chorale au sous-sol de l'église le samedi matin.  Mais quelle erreur de tenir les pratiques pendant Pépino.  Ça ne dura pas longtemps, toutes les raisons étaient bonnes:  j'suis arrivé et y-avait personne... le local était barré... j'avais oublié mon livre de chants... l'abbé Dauphin ne s'était pas présenté... ma mère a vite compris que le Te Deum avait perdu son combat contre Pépino !

C'est le 13 décembre 1908 que la première église fut bénie par Mgr Latulippe, Duhamel et Narcisse-Zéphirin Lorrain.  C'est d'ailleurs en l'honneur du patron de ce dernier que la paroisse fut désignée du nom de Saint-Zéphirin.  Son premier curé, comme tout le monde le sait, fut Eugène Corbeil, arrivé à La Tuque en février 1908.  Il avait accepté la cure à la condition que la petite église soit construite au coin des rues Saint-Joseph et Saint-Antoine et non au bas de la côte, près de la rue Saint-Georges.

L'église paroissiale sur son premier emplacement rue Saint-Joseph
vers 1910

L'église paroissiale sur son premier emplacement rue Saint-Joseph
vers 1910

Mais rapidement, cette première église ne suffit plus à la tâche.  Le curé Corbeil recommanda donc la construction d'une nouvelle église et d'un nouveau presbytère.  Pour ce faire, la fabrique devait contracter un emprunt de 300 000$.  Nous sommes en 1921 !

Gros problème, il fallait déplacer la première église pour construire la nouvelle sur le même emplacement, au coin des rues Saint-Joseph et Saint-Antoine.  Qu'à cela ne tienne, 150 hommes répondent à l'appel du curé Corbeil pour la déménager vers son nouvel emplacement au coin des rues Saint-Georges et Saint-Antoine.   L'église fut d'abord placée sur de longs billots de bois qui servirent de rouleaux et doucement, les hommes la poussèrent vers la rue Saint-Georges.  Françoise Bordeleau raconte dans son livre sur l'histoire de la paroisse Saint-Zéphirin paru en 1987 qu'à "un certain moment, l'église dépassa sa base de rouleaux d'au moins trente pieds.  Les bénévoles réussirent à la remettre en place et finalement la déposèrent sur une base préparée pour la recevoir." 

Son déplacement et son installation avaient coûté 10 491$.

Bibliothèque et Archives du Canada, 1925, photo Canadien National

On voit sur la photographie qui précède et qui date de 1925 que la première église a été déplacée au coin des rues Saint-Georges et Saint-Antoine mais que la construction de la nouvelle église n'a pas encore débuté.


Photo:  Ernest-L. Denoncourt, 1948

Profitant de sa nouvelle base, la petite église en bois s'est vue doter d'un étage en sous-sol pour accueillir les classes de ce qui fut la première école Centrale.  L'église construite en 1908 servira ainsi de lieu de culte jusqu'en 1931 et d'école jusqu'en 1949, année où elle fut vendue à Omer Veillette puis démolie parce que jugée insalubre et dangereuse.

Alors que l'architecte Ernest-L. Denoncourt travaillait à la confection des plans de la nouvelle école Centrale sur la rue Saint-Joseph et en supervisait les travaux, il prit plusieurs photographies en 1948 de l'ancienne église convertie en école.   On voit bien sur les photos suivantes l'ancienne et la nouvelle église.  On remarque que l'ancienne sacristie a été séparée de l'ancienne église et placée à angle droit avec celle-ci.  On appercçoit d'ailleurs encore la marque de son pignon sur le mur arrière de l'ancienne église.


Photo:  Ernest-L. Denoncourt, 1948

Photo:  Ernest-L. Denoncourt, 1948

Photo:  Ernest-L. Denoncourt, 1948

Sur la photographie suivante prise par Ernest-L. Denoncourt au mois d'août 1948 pendant la construction de l'école Centrale, nos deux églises sont bien visibles.

Photo:  Ernest-L Denoncourt, 1948

Espérons maintenant que l'église Saint-Zéphirin demeurera encore longtemps dans le paysage de l'Autre bord du lac...

Photo:  Michel Jutras octobre 2015


Plusieurs informations de cet article sont tirées du livre de Françoise Bordeleau, Les 74 ans de la paroisse Saint-Zéphirin, paru en 1987





Aucun commentaire:

Publier un commentaire